Afterres2050 pose comme hypothèse une généralisation des cultures dites intermédiaires en 2050 , soit le double des surfaces couvertes aujourd’hui. C’est une hypothèse forte du scénario. Elle répond à deux enjeux : restaurer les agrosystèmes et produire de la biomasse pour l’énergie. Mais est-ce bien raisonnable de vouloir faire du gaz d’herbe ?
Mise au point par Céline Laboubée, chargée de mission méthanisation à Solagro.
Appelées aussi « couverts végétaux », les cultures intermédiaires sont des cultures implantées entre deux cultures principales. Elles ne rentrent pas en compétition avec les cultures dites alimentaires qu’il s’agisse de l’alimentation des humains ou des cheptels. S’insérant entre 2 cultures prioritaires, leur cycle de végétation est généralement trop court pour qu’elles arrivent à maturité.
Solagro propose qu’à terme, en 2050, l’équivalent de la moitié des surfaces de »couverts » soient dédiée à la production d’énergie, (20 millions de tonnes de matières sèches au total), en partant du principe que seules seront récoltées les surfaces atteignant une productivité minimum de 4 tonnes de matières sèches par ha, quand l’état du sol le permet.
C’est décisif pour le développement de la méthanisation. Cela permet de sécuriser l’approvisionnement des digesteurs, d’avoir des marges de manoeuvre. On commence d’ailleurs à voir émerger un modèle de méthanisation 100 % végétale dans les zones céréalières. Dans ce modèle, les CIVE complètent un approvisionnement dominé par les résidus de cultures, les grains déclassés, les tontes des collectivités, …
Pourquoi reparle-t-on autant des cultures intermédiaires aujourd’hui ? La pratique n’est pas nouvelle – tout le monde a par exemple entendu parler des cultures dérobées, …- mais elle évolue. Progressivement, on a découvert qu’elles pouvaient assurer d’autres fonctions. Leurs « bienfaits » sont agronomiques, écologiques et ils sont de mieux en mieux documentés. C’est pourquoi nous pensons qu’elles vont se généraliser dans les prochaines années.
Quelles sont leurs qualités justement ?
Elles sont nombreuses. Elles régénèrent les sols, piègent les nitrates en excès, elles offrent le gîte et le couvert à des prédateurs de ravageurs, elles brisent les cycles de prolifération, elles font office d’engrais organiques quand elles sont enfouies ou quand elles retournent au sol sous forme de digestat, après une étape de méthanisation.
Grosso modo, les agronomes distinguent 5 types de cultures intermédiaires. Ensemble, elles constituent la grande famille des CIMSE (cultures intermédiaires multiservices environnementaux). Selon ses objectifs, l’agriculteur choisira une culture pure ou un mélange. La palette est large : phacélie, pois fourrager, avoine, trèfles, vesces, moutardes, maïs, sorgho « plante »,…
Pourquoi les cultures intermédiaires sont elles encore vécues comme une contrainte supplémentaire ?
C’est du travail en plus ! les résultats ne se font pas voir toute de suite : les agrosystèmes ne se restaurent pas du jour au lendemain. C’est tout l’enjeu des programmes de recherche de ces dernières années. Les rendements, les coûts, les impacts sur la culture suivante, l’intégration dans le plan d’approvisionnement des digesteurs commencent à être mieux appréhendés.
Quels sont les points de vigilance ?
L’introduction d’une CIVE ne doit pas gêner la conduite des cultures alimentaires qui précédent ou qui suivent, mais elles doivent aussi avoir un rendement suffisant pour justifier leur récolte. Deux points sont essentiels : le choix de l’espèce et la date de semis. Attention : une CIVE bénéficie rarement de conditions optimales ; son implantation doit être particulièrement soignée pour un démarrage rapide et une production de biomasse suffisante.
En fonction de leur période d’implantation, on parlera soit de :
- CIVE d’été : Après une culture d’hiver récoltée précocement, telle que l’orge d’hiver, le colza ou le pois, il est possible d’implanter une CIVE d’été telle que l’orge de printemps, le sorgho biomasse, le maïs, le tournesol… Elles seront récoltées à l’automne avant d’implanter une nouvelle culture alimentaire.
- CIVE d’hiver : Avant une culture alimentaire d’été, l’implantation d’une CIVE d’hiver peut être envisagée en octobre : céréales, association céréales – légumineuses, oléagineux…..